| Où s’arrêtera le SCA ? A l’issue des matchs aller, Albi vient encore de frapper un grand coup en s’imposant à Colomiers, là où il y a quelques semaines Pau, le leader incontesté de la première phase de la Pro D2, avait subi son plus gros revers. Ce jour-là, la Section Paloise avait encaissé cinq essais et cinquante points (50 à 10), et avait déjà quelque peu perdu de sa superbe. Depuis, les Palois ont perdu au Hameau le derby des Pyrénées contre Tarbes, et sont rentrés ce weekend de Carcassonne avec une autre belle déculottée (40 à 27). Plus que six points d’avance à mi-parcours sur le dauphin alors qu’ils en comptaient encore treize au soir de la treizième journée. Voyant la meute des poursuivants revenir sur eux à grande vitesse (Biarritz, Perpignan, Albi…), les cartes pourraient même bien être totalement rebattues en cas de nouveau faux-pas à Dax pour le match de reprise après la trêve des confiseurs. Non, les Béarnais ne sont pas encore en Top 14. Le résultat des cinq dernières journées les place même dans le ventre mou du championnat et c’est au tour du Biarritz Olympique d’assurer aujourd’hui un rythme infernal !
C’est dire donc la performance réalisée par le Sporting Club Albigeois ce dimanche, une semaine seulement après une terrible (et injuste) défaite de deux points, à domicile, face à l’USAP, sur la sirène. Mais si la réaction Albigeoise est aujourd’hui si remarquée, c’est aussi en raison de la manière avec laquelle cette équipe s’est imposée dans la banlieue Toulousaine. Impressionnante de maîtrise, et de plus en plus sûre de sa force, cette équipe est en train de marquer les esprits et pas seulement ceux de ses adversaires. Quatrième victoire en neuf déplacements, ça commence à attirer les regards, et disons-le de suite, le score de la défaite Columérine (16 à 17) est plutôt flatteur pour le club dont l’emblème est la colombe.
Depuis l’ère du professionnalisme, c’est huit défaites pour Colomiers contre le SCA en onze confrontations. C’est décidément une colombe aux pattes d’argile lorsqu’elle rencontre le club cher à celui qui l’a dessinée sur le maillot bleu et blanc et qui n’est autre que le regretté Eric Béchu, l’emblématique entraîneur Albigeois des années deux mille. Son ombre planera évidemment encore longtemps sur cette pelouse qui s’appelait auparavant le stade du Sélery quand ce dernier évoluait comme joueur en troisième ligne puis comme éducateur de l’US Colomiers Rugby.
Bientôt deux ans que l’Ariégeois d’adoption, passé par les deux clubs, est décédé. Bref, ce court déplacement au Stade de Colomiers rebaptisé depuis quelques années Michel Bendichou, pour Albi et ses nombreux supporters, c’est un endroit qui leur réussit souvent, et comme dit dans la belle chanson interprétée par Henri Salvador, c’est un peu « je voudrais toujours te plaire dans mon jardin d’hiver ». Et justement, en ce premier jour d’hiver et quelques jours avant Noël, les Albigeois ont plu et ils ont vraiment été gâtés. Tous leurs vœux furent exaucés et on aurait pu croire que la chanson avait été écrite en leur honneur : « Je voudrais du soleil (…), je voudrais de la lumière (…), je veux changer d’atmosphère dans mon jardin d’hiver ». C’était en quelque sorte Noël avant l’heure !
Et des cadeaux, Colomiers en fit quelques-uns aux Albigeois durant les premières minutes en ne concrétisant pas une première tentative de drop (3’) et une pénalité en suivant (4’). De sorte que même si Albi n’eut pas d’emblée l’initiative du jeu, et perdit la possession sur son premier lancer en touche, tout cela n’eut pas de mauvaises conséquences et disons que c’était alors plus une question de réglage que de faiblesse. Et comme la mêlée du Sporting fut de prime abord souveraine, ça leur permit de prendre le score par la botte de Peluchon (4’, 3 à 0).
A partir de là, Albi confisqua le ballon aux Hauts-Garonnais et joua un premier petit côté pour Rodokuru qui ne fut pas loin d’aller à dame (11’). Le repli Columérin expédia l’ogive en ballon mort et en résulta une mêlée à cinq mètres. Sur l’épreuve de force, le pack des « bleu et blanc » fut mis à nouveau au supplice par une première ligne Albigeoise de devoir composée de Dedieu, Ponnau, Hamadache et un attelage mobile et puissant formé par Tonga et Damiani. Ainsi Peluchon ajouta trois points de plus (12’, 6 à 0).
Cependant, dans le duel des buteurs, Lafforgue répondit à Peluchon suite à une position de hors-jeu du SCA, 3 à 6 (16’). Mais Albi, malgré un jeu au pied moyen, passa à nouveau à l’offensive et Rodokuru affola la défense locale en jouant un petit coup de pied pour lui-même face au dernier défenseur qui n’eut d’autre choix que de lui barrer la route (21’). Plaquage sans ballon, Peluchon porta la marque à 9 à 3.
Albi envoyait énormément de jeu, parfois presque trop, commettant des maladresses ou s’exposant à faire des fautes comme sur ce coup de pied de Rick où ses partenaires partirent devant et donnèrent ainsi l’occasion à Lafforgue de réduire l’écart. En bonne position, l’ouvreur de l’USC essuyait pourtant un nouvel échec (28’).
Durant le dernier quart d’heure de la première période, on eut droit aussi, du côté d’Albi, à des vendanges tardives. C’est ainsi que Christophe Urios, l’entraîneur d’Oyonnax, nomme ces occasions franches d’essais laissées en route. A quatre reprises, les « jaune et noir » manquèrent le dernier geste. D’abord Taumoepau, décalé, partit à l’essai (32’) mais un en-avant peu évident au préalable annihila l’action. Puis, plein axe, Rodokuru tomba le ballon après un beau mouvement qui s’annonçait gagnant (35’). S’ensuivit un nouveau décalage sur le côté mal exploité (36’) et enfin une superbe séquence des avants stoppée dans les vingt-deux mètres pour un nouvel en-avant… il était temps pour Colomiers que la mi-temps soit sifflée.
Au retour des vestiaires, le SCA craignait une reprise de mi-temps comme souvent difficile avec cette équipe, et de regretter les nombreux points laissés en route. En définitive, il n’en fut rien. Les hommes de Goutta étaient véritablement pris dans la nasse Albigeoise et subissaient trop sur les impacts et dans les rucks. Les deux équipes n’étaient toutefois pas loin de la rupture tellement l’envie de jouer était grande des deux côtés, surtout chez les Tarnais. Et sur une énième relance et un en-avant anodin, Albi concéda une mêlée et son pack se mit pour la première fois à la faute. L’USC revint à trois longueurs (48’, 6 à 9) et recolla même au score sur une faute d’antijeu de Herry (57’, 9 à 9). L’attaque des visiteurs venait de se faire contrer et l’ailier venu à l’intersaison de La Rochelle, et dont c’était la première apparition dans le quinze titulaire, alla gratter un ballon qu’il ne fallait pas, laissant alors ses coéquipiers en infériorité numérique.
Pour autant, les avants Albigeois continuèrent à faire le boulot et obtinrent une pénalité sur mêlée qui les remit aussitôt devant (60’, 12 à 9). Colomiers n’avait pas su saisir l’occasion de prendre enfin les rênes de la rencontre, d’autant que Hough trouvait une magnifique touche à cinq mètres de la ligne Columérine et que Herry faisait déjà son retour sur le terrain (67’).
A un de moins, Albi n’avait pas non plus vraiment souffert et reprenait de suite sa marche en avant, échouant de peu sur la ligne opposée. Cependant Colomiers, acculé, multipliait dès lors les fautes, et un de ses piliers écopait à son tour d’un carton jaune (70’). Déjà que le pack local était en difficulté, cela n’arrangea en rien son affaire. Et après avoir subi au près, le pilonnage des Tavalea, Farré et consorts, concentra la défense et provoqua un coup gagnant sur les extérieurs. Herry, totalement démarqué, partit inscrire l’essai (71’, 17 à 9).
Après avoir fait le break, il ne restait plus, dès lors, au SCA de gérer sa fin de rencontre. Privant les Columérins du ballon, ils les cantonnèrent dans leur camp jusque dans les arrêts de jeu et le retour du carton jaune. Au moment où la sirène retentit, Albi, jamais mis véritablement en danger, se mit à la faute et offrit une occasion rêvée aux Hauts-Garonnais d’accrocher in extremis un point de bonus défensif. La frappe de l’ouvreur remplaçant heurta le poteau mais les avants Columérins récupérèrent la possession et en force allèrent marquer l’essai. Presque inespéré !
Score final : 17 à 16 en faveur du SC Albi.
Même si le staff Albigeois s’empressa de déclarer qu’il fallait encore deux victoires pour assurer le maintien, avec quarante points, et neuf réceptions pour sept déplacements sur la phase retour, le SCA a dorénavant toutes les cartes en main pour faire partie des demi-finalistes pour l’accession en fin de saison, et ne va certainement plus pouvoir se cacher éternellement derrière cet objectif minimum. Car en comptant à mi-parcours neuf victoires et en doublant ce résultat d’ici la fin du championnat, depuis la saison 2004-2005, un total de dix-huit victoires garantit à lui seul la participation aux phases finales.
Quel exploit ce serait si Ugo Mola parvenait dès sa première saison à hisser le SCA dans les cinq premières places de la Pro D2, et même si Henry Broncan qui connait si bien cette équipe, pour l’avoir façonné quatre années durant, l’a annoncé il y a quelques semaines. Il faut bien dire qu’avec un tel paquet d’avants et la qualité de ses recrues (Lafoy, Sheklashvilli, Tonga, Tavalea, Farré, Faleafa, Rick, Hough, Taumoepau, Herry, Valençon, Davetawalu…), le SCA doit se sentir armé pour défendre sa position. En tout cas, sitôt le match fini, la joie des joueurs, du staff et des dirigeants en disait long sur l’ambiance qui règne au sein de ce groupe. Pau, Biarritz ou encore Perpignan toujours en proie à des soucis financiers, ne sont pas encore à l’abri d’un retour au premier plan de cette équipe Albigeoise aux valeurs insoupçonnées, et qui recevra en match de reprise l’équipe de Bougoin face à laquelle tout a si bien commencé le 23 août dernier !
|
